L’art de la conversation, une responsabilité partagée…

Quand il parle, il parle, il parle et que je n’arrive pas à en placer une…

C’est parfois une situation très embarrassante pour les apprenants, que d’avoir beaucoup travaillé en amont pour pouvoir intervenir dans une conversation et de se retrouver dans un échange où un locuteur natif français accapare la prise de parole sans laisser de place à l’interlocuteur qui pourtant fait l’effort de parler en français. C’est encore pire quand nos apprenants comprennent 90 % des informations qui sont transmises et qu’il n’y a pas de problème particulier de vocabulaire ou de contextualisation. 

Ceci génère de la frustration et aussi un doute quant à sa propre capacité à intervenir, à prendre la parole et à interagir avec des francophones de souche. En effet, il est rare d’avoir à disposition un «  bâton de parole » qui permet de réguler les temps de parole et d’écoute active…

Un vague sentiment de honte envahit parfois le locuteur qui n’a pas su ou pu s’impliquer dans la conversation : «  Je n’ai pas répondu à SES attentes à lui… J’aurais dû parler davantage… Pourquoi suis-je resté silencieux… Pourtant j’avais envie de parler… » Un sentiment d’échec peut durablement impacter les prochaines conversations, et pourtant ce n’est pas très juste.

Ce qu’il faut avoir à l’esprit, c’est que dans un échange, la responsabilité de la qualité des informations transmises porte sur les deux locuteurs. Si l’un des deux est manifestement très volubile, il y a lieu de RELATIVISER et de ne pas prendre pour soi, une incapacité à prendre la parole.

En prenant un peu de hauteur, ce qui est essentiel, c’est l’objectif de cette conversation : 

Quelles sont les informations que je devais entendre et quelles sont celles que je devais transmettre?

Pour trouver une place dans cet échange, il faut provoquer des temps de respiration  grâce à un outil : l’art de la reformulation.

Voici quelques phrases-types qui peuvent être utiles en pareil cas :

Peut-on faire une pause pour reformuler ce que nous nous sommes dit s’il vous plait?

Est-ce qu’on peut faire un bilan de notre conversation ?

Est-ce que j’ai oublié quelque chose d’important?

Si, j’ai bien compris, ce que nous nous sommes dit…

Si je vous comprends bien, vous avez essayé de me dire que…

Vous me dites que…

Pour conclure, dans son ouvrage de psychologie pratique mondialement connu, Comment se faire des amis , Dale Carnegie donne 28 conseils, et le 9 ème est le suivant : « Encouragez les autres à parlez d’eux-mêmes. » 

On peut y lire : « Pour bien démarrer une discussion, vous pouvez poser des questions simples. Trouvez des points communs et focalisez sur ce sujet que vous semblez parfaitement connaître tous les deux ! Il est possible que vous perdiez votre langue. Mais ne vous affolez pas, car cela vous donne une occasion en or pour vous concentrer sur ce qui compte : EUX ! Il est toujours bon de laisser les autres parler d’eux, tant pour mieux les connaître que pour le simple fait que les gens aiment parler d’eux-mêmes. »

Donc, si nos apprenants n’ont pas pu en placer une dans la discussion et que celle-ci s’est transformée en monologue, ils se sont peut-être fait un ami de plus, français qui plus est!!! Avec l’espoir de fructueux échanges … pour la prochaine discussion, bien entendu!